Pourquoi quitter le Canada ? Le pays est régulièrement cité comme l'une des meilleures destinations pour s'expatrier. Malgré une récente réforme de son plan d'immigration, Le Canada, terre historique d'accueil, continue d'ouvrir la porte aux ressortissants étrangers. Pourtant, des Canadiens font le choix de partir. Le phénomène n'est pas récent, mais s'est installé dans le temps. Une mauvaise nouvelle, pour un pays qui, confronté au vieillissement de sa population, cherche à garder ses ressortissants. Que recherchent les Canadiens qui partent vivre à l'étranger ?
À la découverte des Canadiens expatriés
Un peu comme les Anglais qui, comptant sur l'omniprésence de leur langue, ne verraient pas l'utilité d'en apprendre une autre, on aime parfois penser que les Canadiens seraient peu enclins à l'expatriation, leur pays, terre historique d'immigration, étant l'un des plus plébiscités par les ressortissants étrangers. « Tout le monde veut vivre au Canada ». Les Canadiens n'auraient donc que peu d'intérêt à aller chercher ailleurs ce qu'ils ont déjà chez eux. Mais tout comme il est erroné de croire que les ressortissants anglais ne maitrisent que l'anglais, il est inexact de penser que les Canadiens ne s'expatrient pas.
Dans un cas comme dans l'autre, les a priori se fondent sur des données déformées. Parler anglais ne suffit pas pour vivre dans tous les pays du monde. Le Canada, bien que plébiscité par nombre d'étrangers, est tout aussi critiqué. Les candidats au départ relèvent notamment un coût de la vie en constante augmentation. Ils partent pour améliorer leurs conditions de vie. Leur motif d'expatriation rejoint celui de beaucoup d'autres ressortissants, qui quittent leur pays pour décrocher un meilleur emploi, gagner plus, bénéficier d'un meilleur cadre de vie. D'après la Fondation Asie Pacifique du Canada (APF Canada), les États-Unis, Hong Kong, le Royaume-Uni, l'Australie, la Corée du Sud, la Chine et le Japon sont les États où l'on compte les plus grands nombres de Canadiens de l'étranger.
Qui sont ces Canadiens qui s'expatrient ?
Environ 4 millions de Canadiens vivent à l'étranger, soit environ 11 % de la population. C'est 36 % de plus qu'en 1990. Les chiffres sont révélés dans le dernier rapport de Statistique Canada, publié le 22 avril 2024. Réalisé par l'Institut d'études canadiennes de McGill pour Statistique Canada, le rapport présente les données de 2016. Les experts ne disposent pas de données plus récentes. C'est justement ce qui a poussé le sénateur Yuen Pau Woo à commander cette étude. Selon lui, l'État ne fait pas assez pour ses ressortissants établis à l'étranger. Le sénateur presse le gouvernement d'établir un plan de soutien pour les Canadiens de l'étranger.
D'après le rapport, 51 % des Canadiens expatriés sont des citoyens par filiation. 33 % sont nés au Canada. 15 % ont été naturalisés. Concernant les citoyens naturalisés, l'étude constate une augmentation progressive des départs à l'étranger, après 4 à 7 ans passés au Canada. Une autre étude publiée par Statistique Canada en février 2024 montre que plus de 15 % des immigrants quittent le Canada dans les 20 années suivant leur arrivée. Ces départs sont plus nombreux pour les ressortissants nés en France, aux États-Unis, à Taïwan, à Hong Kong et au Liban. Les entrepreneurs et les investisseurs sont également plus nombreux à repartir. Ces ressortissants au départ retournent dans leur pays ou immigrent ailleurs.
Quitter le Canada : les raisons du départ
Outre la hausse du coût de la vie, le rapport note un problème qui touche davantage les ressortissants étrangers devenus Canadiens ou résidant au Canada : la difficulté de faire reconnaître ses diplômes obtenus à l'étranger. Cette difficulté s'accompagne de beaucoup d'autres : parcours du combattant pour trouver un emploi, faute d'avoir eu une « première expérience significative avec un employeur canadien », poste occupé in²¹»å²¹±è³Ùé au véritable niveau du travailleur, faibles salaires… C'est la face cachée de l'immigration au Canada. La question de l'emploi, capitale, douche bien des immigrants. Face au mur administratif et à l'incapacité de trouver un bon travail malgré leurs diplômes, une partie des immigrants jette l'éponge.
Pour Statistique Canada, les personnes quittant le pays dans les 4 à 7 ans pourraient justement partir pour ces raisons. Impossible de véritablement s'intégrer lorsqu'on peine à trouver un travail, un logement, une stabilité. C'est justement l'une des raisons pour lesquelles le ministre de l'Immigration Marc Miller a décidé de réformer son plan Immigration. Le nouveau mot d'ordre : « accueillir un peu moins, mais accueillir mieux ». Le Canada veut mieux connaître le profil de ses ressortissants étrangers, pour mieux cibler leurs attentes, et proposer un accompagnement plus efficace.
Les motifs économiques n'expliquent bien sûr pas tous les départs. Les Canadiens de l'étranger évoquent d'autres raisons. Des raisons là encore comparables à celles évoquées par les expatriés en général : coup de cœur pour un pays, opportunité professionnelle, désir de faire carrière à l'étranger, etc. Mais face à l'épineux problème du vieillissement de la population, le gouvernement voudrait inverser, sinon freiner le phénomène. C'est l'une des clés pour maintenir son économie et rester attractif.