L'expatriation permet-elle d'échapper définitivement à l'impôt dans son pays ? C'est ce que pensaient nombre d'expatriés partis pour les États à l'imposition faible, voire inexistante. Les Émirats arabes unis font ici office de favoris. Leur programme de Golden Visa est spécialement taillé pour attirer divers profils, des plus fortunés aux plus talentueux. Mais des spécialistes préviennent. En matière de droits de succession, l'expatriation seule ne suffit pas à rompre le lien. Quelles sont les limites des Golden Visas ? Quelles implications pour les expatriés ?
Golden Visa et très chers droits de succession : l'exemple des ressortissants britanniques
Le Golden Visa fait toujours autant parler de lui. Le passeport doré, qui promet la résidence par investissement, séduit nombre de riches expatriés. C'est le cas des milliers de citoyens britanniques, attirés par les promesses liées au Golden Visa. Quelque 240 000 ressortissants britanniques ont ainsi immigré dans les pays du Golfe ces dernières années, notamment aux Émirats arabes unis (EAU), l'État star des travailleurs expatriés. Particulièrement avantageux, et étendu aux cadres, scientifiques ou ingénieurs, le Golden Visa émirati permet de rester 10 ans sur le territoire et de profiter d'une politique d'impôts sur les revenus et les plus-values quasi nulle.
Les experts rappellent cependant que l'exonération d'impôts dont bénéficient les expatriés britanniques ne se reportera pas sur leurs héritiers. À leur décès, leurs héritiers seront tenus de payer des droits de succession sur leurs actifs. Or, d'après les experts, nombre d'agents immobiliers omettraient de renseigner leurs clients expatriés sur ce point.
Faut-il supprimer les droits de succession ?
Certains riches britanniques opteraient justement pour l'expatriation dans le but d'échapper à l'impôt dans leur pays. C'est sans compter sur les droits de succession sur les actifs britanniques, qui continuent de suivre l'expatrié où qu'il se rende. Droits de succession qui peuvent être très onéreux. Actuellement, ils doivent être payés à 40 % pour une succession d'une personne de plus de 325 000 livres sterling. Pour les couples, la facture grimpe à 650 000 livres sterling ; les propriétaires dont les enfants héritent de la maison principale devront payer 1 million de livres sterling.
Pour éviter la lourde facture, il faudrait rompre presque tout lien patrimonial et familial avec le Royaume-Uni : par exemple, ne plus détenir de propriété sur le sol britannique, ne plus posséder d'actifs sur le territoire. Choses que nombre d'expatriés détiennent toujours, pour conserver un pied à terre dans leur pays, réaliser des investissements, préparer la retraite, etc. Quelles solutions ? 50 députés conservateurs proposent la suppression pure et simple des droits de succession.
Autres limites des Golden Visas
D'autres limites rendent les Golden Visas un peu moins attractifs. Les investissements immobiliers de départ peuvent être assortis de frais supplémentaires (taxes, etc.) qui alourdissent la facture. Plusieurs pays demandent un investissement immobilier de départ d'au moins 500 000 euros ; investissement plus élevé concernant les entreprises. À cela s'ajoutent des frais de 50 000 à 100 000 euros en moyenne. Il faut aussi compter des frais de dossier, qui, là encore, alourdissent la facture. Ces frais de dossier peuvent représenter plusieurs milliers d'euros pour une première demande. Un renouvellement proposera des frais divisés par deux, mais toujours fixés à plusieurs milliers d'euros. Il faut aussi prendre en compte les frais de notaire et d'avocat.
L'autre limitation concerne les zones géographiques concernées par le Golden Visa. Les expatriés ne peuvent pas investir où ils le souhaitent. Leur achat immobilier doit être réalisé dans les zones prévues par le programme. De même, les investissements sont eux aussi limités. Ces limitations peuvent être levées en investissant dans le cadre d'un autre programme que celui du Golden Visa… Encore faut-il avoir les ressources financières pour investir dans d'autres secteurs.
Un visa controversé
Derrière toutes ces limites se cache le principal problème du Golden Visa, qui impacte directement les expatriés qui le détiennent. On l'accuse en effet de faire flamber les prix de l'immobilier et de précipiter les locaux loin de leurs habitations. Un non-sens, dans une crise du logement qui a gagné de nombreux pays. Cependant, certains experts, qui minimisent l'impact des achats immobiliers sur le secteur. Ils reconnaissent toutefois que la présence de riches étrangers sur un territoire donné contribue à augmenter les loyers de la zone. Et, par « riche », il ne faut pas forcément entendre les très fortunés détenteurs de Golden Visa. Il suffit que les nouveaux arrivants aient des revenus supérieurs à ceux observés dans la région d'implantation pour que les prix commencent à augmenter : prix des loyers, de l'alimentation dans les commerces alentour, etc.
Les attaques les plus virulentes parlent d'un visa qui achèterait la citoyenneté et renforcerait les inégalités sociales. De quoi ternir un peu plus l'image des passeports dorés. Le Portugal a annoncé la suppression de son programme. L'Espagne tergiverse encore. D'autres États, comme la Suisse ou les Émirats arabes unis, n'ont pas du tout l'intention de mettre un terme au Golden Visa.